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ANTOINE YVAN

1880 - 1914 Assassiné pour la France

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Antoine Yvan, fils de Henri Yvan (Théodore Henry) écrivain, né le 28 octobre 1880 à Paris, prix de littérature française au Concours général, licence de lettres. Il publie des vers, des romans et écrit et fait jouer des pièces de théâtre dont une à la Comédie Française. Attaché à plusieurs cabinets ministériels, ce qui ne l'empêche pas de partir dès les premiers jours. Blessé à la main le 28 août 1914, il tombe le 30 du même mois en conduisant une charge pour dégager sa compagnie.

Bibliographie :

Poèmes d'autrefois et d'aujourd'hui 1902

Les Rendez-vous, poèmes, 1907

Le jardin de Molière, théâtre, Comédie Française, 1909

L'Homme seul, roman, 1910

Mademoiselle Don Juan, théâtre, Opéra Comique, 1910

L'Amie des jeunes, roman, 1911

Le Révolté, théâtre, Odéon, 1912

Les Gédéon, roman, 1913

Mon ami, l'assassin, théâtre, Ambigu, 1914

Le Testament de Scapin, théâtre, Déjazet, Grévin

Le Petit Corot, théâtre, Grévin

L'île déserte, théâtre, Grévin

 

Ce poème est extrait d'un recueil paru en 1902, Poèmes d'autrefois et d'aujourd'hui, il appartient aux poèmes d'autrefois.

Maison Abandonnée

Je sais une maison hermétiquement close.

Sur le coteau rêveur, au coin d'un bois morose,

Elle dresse ses murs chancelants et vieillis ;

La mousse et le lichen courent sur le toit gris,

Les orages passés ont fendu la façade,

Le temps a revêtu d'une teinte maussade

Les antiques couleurs des abat-jour fermés.

Au dedans, nul écho des bruits accoutumés,

Mais le sommeil pesant et noir des choses mortes,

Le vent rageur qui fait grincer les vieilles portes,

Le plafond qui s'effrite et dans l'obscurité

Distille une implacable et froide humidité.

Le jardin est jauni des feuilles envolées,

Une herbe folle court au penchant des allées

Où sont tombés des fruits trop murs et de vieux nids;

Depuis longtemps on n'a coupé les longs taillis,

Des arbustes sont morts étouffés sous le lierre.

Je suis venu m'asseoir sur les marches de pierre,

Et j'ai pense tout bas aux choses du passé,

J'ai goûté tout un soir le plaisir insensé

De me bercer de souvenirs pleins d'amertume.

J'ai songé qu'autrefois, enfant, j'avais coutume

De courir à travers ces chemins et ces bois.

J'ai senti dans mon cœur comme un écho des voix

Qui m'appelaient au jeu, sonores et joyeuses,

J'ai cru revoir toutes ces heures bienheureuses,

Tant de jours innocents, tant de matins si beaux,

Le ruisseau déroulant ses transparentes eaux,

Le soleil inondant au loin toute la plaine

Et les grands blés jaunis et la route incertaine

Qui s'enfonce sous un rideau de peupliers,

Tous les oiseaux chantant au bord des sentiers,

Et les printemps rieurs, moins gais que notre enfance,

S'ouvrant comme une fleur au souffle d'espérance,

Et que le temps a consumée en un moment.

 

Des amis d'autrefois, les uns obscurément

Sont morts, d'autres ont pris une route inconnue,

Je ne sais pas ce que leur vie est devenue ;

D'autres meilleurs et plus aimés me sont restés

Et nous causons parfois de nos jeunes étés,

Car nous avons laissé dans la vieille demeure

Nos plus chers souvenirs des seuls jours que l'on pleure,

Jours de printemps, jours de bonheur, jours triomphants,

Dans le jardin joyeux tout plein de cris d'enfants.

 

Des poèmes d'aujourd'hui, ce quatrain tiré d'un poème, Aubade :

 

Sur 1'odorant tapis de mousse

Où je viens reposer mes pas,

J'ai fait cette chanson très douce,

Que les amants diront tout bas.

 

et ce Sonnet galant :

 

J'ai rêvé cette étrange chose

Que j'étais bien aimé de vous.

Au milieu des branches de houx,

Tout petit dans sa gaine close,

 

Vous étiez un bouton de rose;

J'étais papillon, votre époux,

De toute la gent qui se pose,

Le plus léger et le plus roux.

 

Vous étiez mignonne épousée,

Nous buvions la même rosée,

Dans la main des feuilles le soir;

 

Dites, de vos lèvres pudiques,

Un petit mot d'amour pour voir

Si mes rêves sont véridiques.

 

 Les Gédéon, Histoire d'une famille immigrée ( 1913 Plon Nourrit ) Voilà un bien curieux roman antisémite qui présente des personnages au demeurant sympathiques. Pas de charge insupportable, pas d'insultes comme chez Gyp, cette aristocrate idiote ou Céline cet immonde petit bourgeois, simplement l'illustration un peu trop forte du fameux reproche d'âpreté au gain et d'avarice et des déclarations un peu ridicules de supériorité et de visées impériales certainement censées renforcer ou illustrer les campagnes banales à cette époque du parti antisémite autour du faux protocole en particulier. Antoine Yvan ne manque pas de talent, on se demande un peu pourquoi ce roman qui aurait finalement pu être une simple dénonciation ou description des milieux du commerce de l'art ou de l'acharnement des immigrés à réussir verse ainsi parfois dans cette lamentable tare. Dans ses moments de vaudeville il nous rappelle presque le ton de certaines scènes de la Révolte des anges d'Anatole France. Un vieux marchand de tableau s'appelle Blum mais en 1913, Léon Blum n'était guère connu que de petits cercles, le vieux rabbin s'appelle Bérézina, mais, je le répète, la caricature ne parvient pas, peut-être ne le cherche-t-elle pas, à effacer le coté attachant des personnages du roman. Quand l'ancienne servante devenue fausse princesse, triche en laissant reconnaître son fils bâtard de Gédéon par un comte, je ne vois pas la ruse ou la fourberie, mais je ris de la malice de cette mère qui veut pour son fils le meilleur et du naïf et prétentieux orgueil de Monsieur le Comte prêt à serrer son pseudo fils dans ses bras par vanité et fierté parlementaire? Il n'en demeure pas moins que ce roman laisse un constant malaise jusqu'à ses dernières pages où l'on voit une jeune mariée juive faire place nette dans l'entreprise de son mari pour faire embaucher des compatriotes !

 

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