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ENCORE UNE RENTREE LITTERAIRE.... ( la 2003 - 2004 )

 

 Beigbeder Nothomb  Abecassis  Amette  Rouart Kadaré Boudjedra  Benmalek Vaneigem Sepulveda Leys Gide Thomas Martin du Gard Valberg Eco Gary Glucksmann Lepape Lottman Pour une Revue Paasilinna Richard Millet

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Humeurs, humeurs au jour le jour, à la minute même. Je mettrai ici mes réactions décousues, sous forme de journal, pour parler de la rentrée et d'autres choses. Cela jusqu'à ce que la fatigue ou le dégoût me ramène ailleurs, à une autre époque avec mille excuses pour les talents à coté desquels je serai passé... Si les "professionnels" de la littérature, critiques, patrons de revues, éditeurs, auteurs, faisaient leur boulot, mais à l'exception de quelques auteurs, ils ne l'ont jamais fait! Ce n'est pas seulement les mentalités qui changent le climat, les méthodes, c'est surtout la technique qui permet aux plus mauvaises habitudes de mieux s'épanouir!

La suite d'encore une rentrée littéraire... et d'autres choses

26 août 2003 Beigbeder, Nothomb,

La nouvelle rentrée littéraire est en marche. Mon petit libraire de province a fait, le 20 août, place nette sur l'étal des nouveautés. Comme je lui demandais en riant si c'était pour préparer la rentrée, il m'a répondu "oui" et "et on va nous en balancer des nouveautés, encore plus que d'habitude!" Visiblement effaré par cette averse qui s'annonce. Encore, lui, ne lit-il pas tous ces livres qu'il se contente, avec sagesse, de vendre!

Une semaine plus tard, des avancés arrivaient au nombre desquels un Amélie Nothomb et un Frédéric Beigbeder qui ont certainement peur qu'on ne les remarque pas assez dans la valse qui se profile et qui veulent être assurés de quelques semaines - jours - de vitrine.

J'ai acheté et lu le Nothomb. Cela s'appelle Antéchrista et cet Antechrista n'est pas Ben Laden dénoncé comme tel par Georges Bush, ni ce même Bush qui ressemble comme un frère à l'Antéchrist annoncé par l'Apocalypse. Non, il s'agit d'une gamine narcissique, mythomane et peut-être un brin sadique. Donc, Amélie Nothomb a encore écrit un livre, on nous dit même que c'est un roman, soit, le roman ces derniers temps a raccourci et a tendance à se confondre avec de longues nouvelles. C'est écrit comme d'habitude chez cet auteur, enlevé, cela peut se lire dans le métro, c'est nécessaire, il y en a de plus en plus en France. Il y a également de plus en plus d'auteurs qui font leurs cent soixante pages annuelles, c'est de l'économie littéraire. Vous pouvez lire ce livre de Nathalie Nothomb, comme vous pouvez ne pas le lire, cela ne changera pas grand chose mais, si vous le lisez, il ne vous tombera pas des mains et ce ne sera pas le cas de bien des livres de la rentrée! Tiens! par exemple! prenez ce Beigbeder, en voilà un qui m'est bien tombé des mains à l'étal! A peine lu la petite notice de quatrième de couverture, qui se voudrait alléchante. C'est qu'il s'agit de ce qui aurait pu se passer dans je ne sais quel restaurant de quel étage d'une tour du WTC juste avant l'attentat. Cela sent le nécrophage et pour tout vous dire je commence à trouver qu'il y a un peu trop de nécrophages actuellement! A croire que la littérature est devenue l'art des vautours! Donc pour revenir à Amélie Nothomb, disons qu'elle connaît son métier, le livre est un livre... peut-être demanderait-on un peu plus, peut-être pas vous! Habitués du Monde peut-être, vous êtes forcément fascinés par une prose qui n'endort pas! Il semble que l'éditeur ait eu une idée, - pas originale (sinon, ce ne serait pas un éditeur!) - deux livres au moins sont parus sous la même image, peut-être est-ce l'image d'Albin-Michel pour cette saison et que ces deux locomotives sont censées donner envie de s'y accrocher! Nous verrons bien!

Amélie Nothomb, Antéchrista, Albin Michel, €14,50

27 août 2003 Retour Haut de Page Abécassis,

C'est bien cela, ce matin, il y a chez mon libraire cinq livres de chez Albin Michel sous même "image". J'en achète deux, l'un pour le titre, "Clandestin", l'autre pour Brecht. Clandestin commence à la page 9, à la 16, après deux chapitres (?) je suis déjà abreuvé de banalités. Est-ce que ça va continuer? Je vois qu'Eliette Abecassis a déjà fait publié six livres! Mon Dieu!

28 août 2003 Amette,

J'ai encore donné quelques pages à "Clandestin", mais à la 27 j'arrête, c'est trop, au-dessus de mes forces, si j'avais à rendre compte de ce livre je déclarerais forfait. Je prends le troisième Albin (Albin-Michel) acheté hier. La Maîtresse de Brecht de Jacques-Pierre Amette. De cet auteur, je connais seulement le nom, c'est Brecht qui m'a attiré. Heureuse surprise. Je ne lâche le livre que j'avais pris tard qu'après cinquante pages. Les cinquante premières qui me font penser à du Kadaré, cet immense écrivain que les crétins du Nobel, effrayés peut-être par quelques petits maîtres chanteurs, (devinez qui par exemple?) essaient de faire oublier, c'est eux et leurs prix qu'on oublie! Amette nous parle de Brecht, ce géant du théâtre rentre en Allemagne après quinze ans d'exil. Il est immédiatement surveillé par les sbires de la Stasi et du ministère de la culture. Nous plongeons dans ce monde que nous oublions déjà, celui de l'univers glauque des Hitler et Staline que des Bush et Sharon remplacent aujourd'hui, avec, heureusement moins de moyens, moins de pouvoirs sinon une moindre volonté de nuire! L'écriture est heureuse, aucune concession à la mode, cette mode du style - de la merde -, d'ailleurs il semble sacrifier plus à Stendhal qu'à Céline, ce maître de l'esbroufe! Certainement un écrivain qui trace son chemin et se fout du reste. La nuit, réveil, je reprends le livre. Il prend son propre rythme. Allons, j'irai jusqu'au bout avec plaisir, j'aurai eu au moins une bonne surprise cette année!

Jacques-Pierre Amette, La Maîtresse de Brecht, Albin Michel, 18,50€ -

Amette a publié son premier livre en 1965 Le Congé, Mercure de France. Il ne publie pas un livre par an. Il écrit aussi pour le théâtre. Chez les libraires, je cherche en vain d'autres livres de lui, ces messieurs les éditeurs n'assurent pas le suivi, même en poche!

On imagine le mépris que je peux avoir pour ce prix qui très souvent ces dernières années a été à des livres fades, sans intérêt ou franchement mauvais. Le moins qu'on puisse dire, c'est que pour le prix du centenaire, avec toute la superstition qui s'attache à ce genre de manifestations, les pauvres académiciens avaient intérêt à redorer un blason bien terni. De plus... les récompenses! Du Prix Dynamite que ces pauvres académiciens scandinaves aux cerveaux gelés feraient mieux de décerner l'été et auquel on ne fait même plus attention - à peine un petit strapontin d'exposition qui nous gêne quand nous passons devant le stand littératures étrangères dans les FNAC! - à tous ces pauvres prix qui se battent pour être remarqués des lecteurs!

Ils ont donc choisi un livre déjà bien sélectionné par le public et, pour ne pas qu'il leur échappe au profit d'un concurrent, ils l'ont décerné avec quinze jours d'avance. On voit d'ici la gueule des juré(e)s des autres prix! Ces dizaines de petits Napoléon(nes) aux petits (tout petits) pieds qui se croient investis du droit de récompenser des auteurs qui, quand ils le méritent, les dépassent de la tête et des pieds, que ces Messieurs ont "offensés" Ah! Bon!

Pour une fois donc, nous nous réjouirons que ce Prix fétiche ait été à un livre qui honore les lettres. Bien écrit, sans faux clinquant, un sujet intéressant, une figure de Brecht en fin de vie bien située par quelqu'un qui est semble-t-il imprégné du personnage. Un arrière plan original avec cet agent de la Stasi amoureux transi... Bref, un livre qui devrait plaire autant au grand public qu'à une élite (vous avez dit éli... quoi?...) Peut-être que le Prix décidera ces nullités des éditions du Seuil (au fait condoléances charlots*...) à replacer sur les rayons des libraires les précédents livres de l'auteur.

Un seul petit ennui avec Jacques-Pierre Amette, il compte Céline parmi ses amis, bah, nul n'est parfait, l'important c'est qu'il ne lui ressemble pas à la différence des innombrables innommables qui ne l'ont même jamais lu mais qui en héritiers médiocres et abusifs, écrivent comme des pieds!

Félicitations donc à Jacques-Pierre Amette, ce qui compte ce n'est pas le prix mais la diffusion et le public nouveau qui sera touché par le biais des cadeaux de fin d'année, cela peut faire naître, quand il s'agit d'un bon livre, des vocations de lecteur, voire d'auteur - plus d'agent de la Stasi heureusement!

*Charlot si l'on parle du grand comique, charlots si l'on parle de ses imitateurs involontaires, au Seuil, ils se reconnaîtront!

 

 

La revue Lire annonce quatre-vingt premiers romans pour cette rentrée. Quatre-vingt, deux fois quarante! Décidément, j'ai raison de ne pas essayer de publier! Trop de voix déjà, trop encombrée la scène et par trop de minables sans intérêt! Je sais, je juge sans savoir! Mais comment faire le tri dans cet amas informe? La critique? Elle est nulle! Les écrivains qui parlent de leurs confrères? Lesquels? Je n'ai aucun respect pour la vieille clique du Goncourt par exemple, pour ne citer qu'elle! Et puis, ou il y a les coteries sans intérêt, vieilles association de poussahs, ou bien personne ne parle de personne, comme si chacun était conscient du désert! La plupart des livres sont éliminés (par moi) sur simple lecture de l'avis de quatrième et de quelques pages. Je n'en fais même pas l'acquisition. Je pense à ce débat sur les droits d'auteurs, le livre lu par plusieurs personnes! Tous ces gens rembourseraient-ils le livre qui ne tient pas sa promesse, qu'on jette après quatre ou cinq pages? La propriété intellectuelle est devenue la tarte à la crème, une occasion de tondre et d'escroquer le public! Ainsi des films vendus depuis vingt ans sur plusieurs types de supports qui disparaissent les uns après les autres, nous rembourse-t-on ces droits payés de multiples fois? Et puis il y a ces supports frappés d'un droit comme s'ils allaient servir systématiquement à copier des œuvres, alors que, parallèlement on rend impossible la copie de ces dernières! Escroqueries que tout cela! Escroqueries légales, orchestrées par le Ministère de la Culture, ce rempart des impuissants, ce fief du clientélisme, cette machine à distribuer aux copains les deniers publics!

C'est vrai, la "rentrée littéraire" est un événement, un événement pour les amateurs d'événements, entendez les fabricants. Le Monde y va de son couplet, le Figaro également. Dans ce dernier on a choisi Angelo Rinaldi... c'est dire! Je me souviens d'un recueil de critiques de ce bonhomme dont l'Express avait fait une plaquette! Il faudra que je la retrouve pour en donner quelques citations. Il s'est fait, paraît-il, élire à l'Académie Française depuis, comme on le voit, le ridicule ne tue toujours pas!

Lire ce qui s'écrit des autres, c'est parfois, même quand ces critiques n'en sont pas ou sont tellement mauvaises que vous restez sur votre ignorance, faire un retour sur soi. "Difficile de publier", écrit-on! Parfait, personnellement je ne le souhaite pas. "Quand on publie, on a beaucoup de chances d'être aussitôt oublié." Cela ne fait rien, c'est ce que je souhaiterais le plus dans cette perspective. La vraie question c'est, il me semble, qu'écrire? Je crois de plus en plus qu'on ne devrait écrire qu'un livre et qu'il ne devrait être publié qu'après notre mort. Un énorme livre fourre tout, dans lequel on essaierait de faire tenir tout ce que d'autres gaspillent avaricieusement - (on me chicanera certainement ces deux termes contradictoires, c'est pourtant comme cela que je le ressens, ici, c'est le fait de dépenser qui devient avarice parce qu'on dépense tout ce que l'on a montrant ainsi que l'on a peu) -  dans des dizaines de livres inutiles. Que je parle de mon monde, de la façon dont je le vois, de ma vie, de la façon dont je l'ai conduite ou dont elle m'a conduit, cela ne peut intéresser que si c'est dans le cadre d'un tout. Je suis face au monde, je ne peux qu'essayer de me restituer face au monde. La forme? Elle peut tout être à la fois ou une seule chose. Poèmes, pourquoi pas, roman, roman touffu, roman d'une vie dans le monde, non linéaire - la vie n'est pas linéaire, peut-être pas nombriliste, la vie est vaste par les effluves qui viennent la marquer, mais aussi journal, comme celui du père Léautaud! Celui-là est peut-être le premier à avoir pressenti que notre trace c'est soi face au monde, dans le monde, en dehors du monde, mais dans la durée. Tout faire entrer même ces choses contre lesquelles on se bat. Par exemple, pour moi, la politique avec cette vieille ambiguïté que je traîne : mes passions, mes exigences, le sentiment vif de mes responsabilités et l'impuissance, le refus de sacrifier à cette basse cuisine, de me laisser emporter par l'esprit partisan, la sensation qu'il faut exister ailleurs. Montrer la vérité, mes tentations, mes errements, montrer ce qu'ils ont été, tenter de savoir pourquoi... Difficile, sur chaque sujet, sur chaque aspect de ma vie, de ce qui me touche de la vie du Monde... Je me souviens de l'attente qui fût la mienne du troisième volet du triptyque romanesque de Raymond Abellio, Heureux les Pacifiques. Je l'attendais, persuadé qu'il ne serait jamais écrit après La Fosse de Babel et les Yeux d'Ézéchiel sont ouverts. Quand il sortit, je vis qu'il était ailleurs, que l'auteur n'avait pas tenu sa ligne. Ce roman du silence ne pouvait pas être écrit, il en avait écrit un autre. C'est aussi celui-là que je voudrais écrire. Voilà que je suis loin de la rentrée, justement comme le Père Léautaud dans ses chroniques théâtrales, je digresse.

31 août 2003 Retour Haut de Page  Rouart,

J'aime bien Jean-Marie Rouart, je l'appréciais déjà avant 1994, depuis ce livre courageux : Omar, la construction d'un coupable, dénonçant ce qu'il faut bien appeler un complot judiciaire, certainement un des plus sordides que la France ait connue depuis l'Affaire, celui qui entache encore le semblant de justice qui y règne, j'apprécie l'homme derrière l'écrivain (Et Chirac qui n'eut même pas le courage de libérer un innocent contre la libération de deux vieux cons eux, vraiment coupables!). Quand j'ai vu ce titre, légèrement provocateur : "Adieu à la France qui s'en va", je n'ai pris la peine de prendre le livre que parce qu'il y avait son nom en haut de la couverture. "La France", depuis que j'ai été victime de ce pays raciste et xénophobe où l'on essaie de vous empêcher d'épouser une étrangère, il y a entre ce mot et moi comme un abîme de haine contre lequel j'ai dû me battre pour ne pas me laisser submerger, car c'est celui à qui on fait violence qui est en danger de haine comme si celle des bourreaux rejaillissait sur lui! Cependant, je sais que les mots ne recouvrent pas toujours la même réalité. Je dois l'avouer je suis trop citoyen du monde pour que cette petite province nombriliste d'agités qui se prennent pour Dieu le père, le fils et le Saint-Esprit tout à la fois m'intéresse beaucoup quand elle affirme ses particularités exemplaires. Evidemment, quand je fais le compte de mes penchants littéraires, je dois bien avouer que ceux qui viennent de cet espace où qui l'ont adopté, Gary, Istrati par exemple, sont au premier rang. Question de culture. Pendant des mois, me battant contre le régime fasciste et de Balladur, Pasqua et Weil , j'écrivais en tête de mes lettres aux officiels, ministères et autres mauvais lieux : "La France, ce n'est pas Voltaire, c'est tout ce contre quoi il s'est battu!" Ce long exergue pour dire que je suis entré dans la lecture du nouveau livre de Jean-Marie Rouart en faisant fit des préventions que le titre aurait dû provoquer. J'étais curieux de découvrir derrière la nostalgie qu'il implique, les racines de l'homme. Si Jeanne d'Arc, courtisane mythique, ne m'intéresse pas, je l'abandonne aux curés et aux fascistes, Gary, Drieu la Rochelle, Stendhal et l'Affaire Dreyfus me concernent plus. (Je sélectionne dans la liste de la quatrième de couverture). Autant dire tout de suite que la problématique évoquée ne m'intéresse pas. Je pense que les entités abstraites que Rouart évoque, sont des illusions réelles qui subsistent dans la mémoire de ceux qui les créent, qu'elles n'ont pas d'autres champs et pas d'autres réalité sous peine de devenir d'épouvantables épouvantails militaro - conquérants pour excités de seconde zone et le plus souvent de petit courage (Qu'on se souvienne de Barrès le héros guerrier de l'Assemblée Nationale, ou, plus près de nous, de cet écrivain qui préférait "survivre" - moi aussi - pour témoigner!) Voilà que je parle encore de moi, mais un critique qui ne parle pas de lui ne peut-être qu'un imbécile ou un universitaire, ce qui n'est pas loin d'être la même chose, puisqu'on n'apprécie une oeuvre qu'en fonction de ce qu'on est et que toute prétention objective, n'est que "dissécation" pédante pour ne pas dire pire. Premier chapitre de ce livre, j'entre dans le souvenir d'un mort de la légion, merde, j'ai l'impression de marcher sur quelque chose de sale. Je lis : "J'éprouvais une sensation de fraternité avec ses vieux étendards. Ils me parlaient. Tant d'énergie, de courage, de foi en un idéal mystérieux se résumait dans ces hampes figées au garde-à-vous." Voilà ce que je ne peux pas ressentir, ce qu'à la limite, je ne peux pas comprendre tant cela est à l'inverse de générations de gens pacifiques, massacrés par ces soudards, dont je me sens l'héritier. Mais à la suite je lis : "J'étais en face d'une énigme que je ne pouvais pas comprendre et qui, pourtant m'émouvait." Puis on me parle d'un autre mort, Romain Gary, qui aurait peut-être compris ce langage, qui en était certainement proche et que, pourtant, je reconnais comme l'un des miens. J'en évoque alors un autre dont il va être question dans ce livre, Drieu. Et pour clore le chapitre, Rouart me dit : "... Je me sentais relié à un passé commun, à des épreuves, à d'autres vies. Un sentiment d'appartenance moins à un pays, à une communauté, qu'à une belle idée qui, comme une lumière, avait guidé tant d'hommes à se hisser au-dessus d'eux-mêmes." Mais : "Ce sentiment poignant, c'était le sentiment de la France." Ainsi le sentiment d'appartenance est commun, nous parlons tous deux d'épreuves, mais l'idée n'est pas la même. Là où J.M. Rouart évoque le "au-dessus de" je vois le sang des autres, les pillages, les incendies et les viols et je ne peux pas communier dans l'illusion qu'il y a là une quelconque grandeur à laquelle il faudrait donner un nom. Illusion, la même peut-être que celle qui mena Drieu au désespoir quand elle fut confrontée à la triste réalité dans les tranchées de la Grande Guerre. Dans le second chapitre, au sujet d'un cochon qu'on égorge, je relève : "on sentait l'ivresse rituelle du sang, le plaisir simple et innocent de faire souffrir et de tuer en toute légalité." Pour le coup, je ne parle plus du tout le même langage. Je dois avouer que la moindre complaisance dans le massacre d'un cochon, c'est tellement con,  me rend celui qui l'éprouve répugnant. Ce que je ne peux concevoir que comme une sordide corvée, j'admets mal qu'on en tire une "innocente jouissance" sans être une brute attardée. La sensibilité... ainsi quand on me dit "qu'il y a toujours quelque chose qui cloche entre les curés et les militaires, deux uniformes, deux sacerdoces qui sont chacun en quête de suzeraineté..." j'entre dans l'ailleurs. Pour moi, ce qui compte dans ces deux vocations, le soldat et le prêtre, c'est ce qu'ils ont en commun : la volonté de nuire, que Rouart appelle la quête de suzeraineté. Je vois deux esclaves qui veulent régner et je les regarde en homme libre qui ne veut rien entendre ou subir d'eux. (11 octobre 2003 Un ajout que je ne pense pas inutile : j'avais dit que je reviendrai à ce livre, je l'ai fait au moins pour quelques pages : Drieu, Mort du mal de la France. Même si je pense que Drieu est plutôt mort du mal du monde, ces quelques pages de Jean-Marie Rouart valent d'être lues.

Jean-Marie Rouart, Adieu à la France qui s'en va, Grasset, €18

6 septembre 2003 Sepulveda Benmalek Leys Boura

Il paraît que la vraie "rentrée" c'était hier, hier que l'invasion a eu lieu chez les libraires, le nouvel occupant est là, qui va collaborer? J'ai acquis quelques livres "avant". Un Sepulveda qui nous parle de Pinochet, ce Saddam Hussein créé par l'Oncle d'Amérique et qui a massacré des Hispanisants à moitié Indiens, chez les Anglo-Saxons, au Pentagone et dans d'autres lieux de mauvaise renommée, cela ne se comptabilise pas, un Anouar Benmalek, mais ceux-là ne sont pas vraiment des inconnus. J'ai eu un petit bonheur de lecture avec le Simon Leys, Les Naufragés du Batavia, mais ici le bonheur était promis. Je reviendrai peut-être à Rouart mais franchement il m'emmerde avec ses idées d'un autre âge, ces survivances de vieilles escroqueries si destructrices... Ce qui m'irrite ce n'est pas tant ce qu'il me présente que la bannière sous laquelle il le fait, il faudrait de l'originalité, du génie pour que cela passe, il n'a que du talent et le talent c'est toujours laborieux! Le Siècle des Goncourt de Olivier Boura est bien court, bien ramassé, enfin, quelques bonnes pages et l'inévitable Céline, que ce malade hante encore un peuple qui envoya Dreyfus au bagne est significatif et qu'il existe encore des crétins pour s'extasier sur son "style" ou le considérer comme une évidence, également. Sur la Toile, (Mon Dieu, que les Français ont l'imagination courte! Appeler Internet la Toile! De quoi vous faire apprendre enfin l'Anglais!) j'ai été sur le site Gallimard, les quinze nouveaux romans sont là, on s'en fout, c'est visible. L'effort de promotion est vraiment minimum(*) si l'on songe au merveilleux instrument de communication que ces gens ont entre les mains et que l'on voit ce qu'ils en font! Je sens que déjà tout ce remue-ménage conventionnel m'ennuie, j'y pressens l'habituelle agitation stérile des commerçants et de l'actualité faisandée, fabriquée, convenue, cela suffit à m'éloigner.

(*) Voilà que j'ai eu tort. Au Canard, quand je le lisais, il y a trente ans, on disait "pan, sur le bec!" Gallimard utilise mieux la Toile que je le prétends, (excuse-moi, vieille maison!) donc "ne se fout pas de ses quinze romans", encore aurais-je du "cliquer" là où il fallait, ce que je n'avais pas fait (Ma faute ou défaut d'ergonomie?). Voilà ce que c'est l'humeur, parfois de l'injustice et le monde des hommes ainsi reste imparfait, mais c'est bien là sa vocation!

9 septembre 2003 Kadaré

Ce sont les excès de style, ces livres écrits en phrases tronquées, coupées d'onomatopées, bourrées d'adjectifs, d'adverbes ou de verbes, hachées de points de suspension, d'interrogation ou d'exclamation dans lesquels une énumération semble sans cesse en chasser une autre, qui me font écrire que le style n'est rien. Il y a aujourd'hui une religion du mal écrire que l'on pratique sous couvert de "style" et il est bien évident que cela fait penser à du sous Céline, du Céline de pauvre, de bazard. Kadaré est quant à lui de ces écrivains qui justifient mon approche du style. Le style c'est une partie de l'alchimie de diverses choses qui se fondent pour faire d'une oeuvre ce qu'elle est. Le style est souvent insaisissable mais on sait dès la première page qu'on est dans un livre de tel auteur quand celui-ci a une marque. Rien de semblable avec les "stylistes contemporains", ils sont parfaitement interchangeables, leur style ne relève que de l'application laborieuse de recettes, toujours les mêmes. Il ne se fond avec rien parce qu'il n'y a rien dans leurs livres. Chez Kadaré, il y a un tout qui fait que le quotidien tend la main au mythique, que le détail prend un sens épique sans qu'il y ait abus de langage, au contraire. Le flamboiement des mots n'est rien en lui même que destruction du langage, il faut du génie pour le faire parler alors qu'il est utilisé quotidiennement par des tocards incapables d'écrire simplement.

J'ai écrit dissécation au lieu de dissection, quand je m'en suis aperçu, j'ai refusé de revenir au mot juste, l'autre, le mien, me semble mieux répondre à mon intention.

(En marge de la rentrée, littérature murale) Exemple de mauvaise publicité : on nous dit sur une affiche SONY, qu'Alexandra et Pierre ont réalisé, qui son premier album photo numérique, qui sa première compilation musicale, le 22 août 2003. Seulement le 22 août 2003, quel retard, je regarde ces deux tocards et je me dis que dans l'univers SONY, on n'est vraiment attardé!)

10 septembre 2003 Retour Haut de Page Kadaré

J'ai lu les deux derniers livres de Kadaré qui forment un ensemble, avec une intensité de tous les instants. Il nous fait faire une descente dans cet univers étonnant d'un petit pays à l'héritage culturel lointain prestigieux, aux moeurs étonnement archaïques dans l'Europe du XXème siècle, placé dans la tourmente de la tyrannie la plus apparente de l'époque, celle des dictateurs marxistes - staliniens (Staline, Mao). La figure mythique du Successeur court le long de ces pages pleines des échos de ce présent composite. Kadaré avec un art accompli nous fait ressentir la solitude inquiète des victimes et toutes le sont, le cheminement du Guide, l'ambiance nue, froide de cette société irréelle. A chaque instant il l'a raccroche au passé de l'humanité dont elle est tout autant le fruit que les autres. Mais tout cela n'est pas important, ce qui compte c'est la façon dont on pressent l'éternel derrière la petite histoire, c'est la vieille tragédie grecque qui se continue ici sous nos yeux avec cette composante qui peut-être trop souvent nous échappe, le poids des préjugés, des peurs, des croyances ancestrales.

Ismaïl Kadaré, La Fille d'Agamemnon et Le Successeur, Fayard, €12 et €16, couvertures illustrées de toiles de René Magritte.

Evoquant Kadaré qui sera le grand plaisir de cette rentrée, je ne peux une fois de plus m'empêcher de penser à ce jour honteux pour la culture française où il a été agressé par un crétin médiatique célèbre qui croyait ainsi faire un coup d'éclat de plus et qui n'a fait qu'étaler sa sottise, sa malhonnêteté, son incroyable crétinisme. Que cet agité passe encore sur les écrans, écrive encore et soit une vedette de ce monde de l'image qui tue tout ce qu'il touche est affligeant, mais ce souvenir bien entendu, celui d'une honte que le hasard des naissances m'oblige à partager, ne pèsera rien dans un futur où le crétin sera oublié alors que Kadaré demeurera un loupé parmi d'autres de ces pauvres Nobel qui ont la fatuité de croire qu'ils peuvent reconnaître le génie sans avoir la moindre idée de ce qu'il est! Et je le rappelle parce que cela me semble un comble, le Crétin est un de ces anciens maoïste français qui n'avaient aucune excuse d'être les adeptes de cet Hitler asiatique. Certains aujourd'hui, affirment encore que "face à leurs ennemis d'alors, ils avaient "raison" d'être maoïstes!" ce qui prouve que la connerie est sans limite et que le temps ne l'éteint pas. On n'a en effet jamais raison de se tromper de la sorte, surtout quand on a sous la main tout ce qu'il faut pour voir, pour savoir. Avoir été communiste stalinien ou maoïste, dans les pays occidentaux, après 1945 est une tare irrémédiable, surtout pour ces pauvres fils de bourgeois gaullo - socialistes  qui se sont jetés par la suite à la soupe libérale. Faillite d'une génération, génération de faillite, Kadaré, lui, nous parle d'un monde où il a dû vivre - survivre - d'où il a réussi a composer une des oeuvres majeures de cette époque, celle peut-être qui rattachant le mieux les dictatures marxistes à leurs ancêtres dont l'Empire Ottoman, restera la seule à témoigner de ce phénomène. Je ne connais personne aujourd'hui, qui ait, en France, le droit d'ouvrir la bouche face à Kadaré et il fallait une dose incroyable d'imbécillité pour refuser d'entendre ce qu'il nous dit.

11 septembre 2003 Retour Haut de Page Boudjedra, Benmalek,

Je commence Les Funérailles de Rachid Boudjedra alors que je suis entrain de lire le dernier Benmalek, c'est que ce livre est trop gros pour être emporté en voyage. Ainsi j'entends simultanément deux voix qui me parlent des mêmes horreurs, ces tueries imbéciles au nom d'un hypothétique Dieu. On sait qu'à l'origine de l'Islam, il y eut la volonté d'un homme de sortir de leur crasse et de leur ignorance relative les tribus de la péninsule arabique. Pour cela il se fit prophète et il y eut tout lieu de croire à une certaine époque qu'il avait réussi. Les Arabes s'étaient taillés un empire, dans le flot des superstitions judaïques ou chrétiennes, les nouvelles étaient apparues comme une sorte de simplification. Le nouveau dominateur demandait d'appeler Dieu d'un autre nom, de faire de nouvelles clowneries pour l'honorer, qu'importe puisqu'il s'agit toujours du même Dieu - qui soit dit en passant à bien l'air de se foutre totalement des prières et du reste! Puis, assez rapidement, le pouvoir glissa des mains arabes pour passer à d'autres. La Perse se retrouva sous le nouveau Dieu, plus indépendante que jamais, les Kurdes à l'Est, les Berbères à l'ouest... jusqu'à l'arrivée des Turcs. La messe était dite mais la sphère islamique d'origine se dirait maintenant arabe, en raison de la langue certainement, contre toute vraisemblance. Le christianisme, le judaïsme, on le sait sont des facteurs de barbarie, de ralentissement de l'évolution. L'Europe a dû lutter dur pour s'émanciper du catholicisme et le protestantisme qui a commencé cette action est peut-être encore pire ainsi que nous le prouvent les sectaires attardés d'outre Atlantique, mais rien n'équivaut au degré de barbarie aujourd'hui véhiculé par l'Islam! Qu'est-ce qui fait sombrer cette religion dans la pire sauvagerie en Algérie par exemple? Est-ce la haine du prophète? Car dans son projet il y eut la volonté de réhabiliter les femmes, de les protéger! Les hommes de ces zones eurent tôt fait de retourner contre elles les mesure du Prophète, mais ce demi-Dieu par eux révéré avait bien failli remettre en cause leur supériorité de pauvres mâles sauvages! Honorer, glorifier cent fois par jour celui qui a plongé le fer au plus profond de leur barbarie, voilà à quoi est condamné un homme, musulman, qui se croit encore supérieur à la femme dont il est sorti! Quel supplice! Quelle haine inconsciente de ce prophète doit-il nourrir dont dès lors, la femme, sera la figure expiatrice! Chaque femme violée, torturée, massacrée, égorgée, c'est ce Prophète honoré et secrètement haït que le fou de Dieu tue! Cela seul explique non seulement la sauvagerie des meurtres de mères, d'enfants, (l'enfant, c'est l'image de la mère, sa fécondité, leur propre origine reniée et avec elle leur foi), mais aussi ces contraintes de voile et autres absurdités de sauvages attardés qu'ils imposent, détournant ainsi à chaque pas la pratique de la volonté qui a institué le rite, protecteur à l'origine. Ainsi, une des pires calamités des paroles de prophètes apparaît : leur rigidité, l'impossibilité d'évoluer. Le christianisme a connu lui aussi cette entrave mais moins forte parce que les préceptes étaient plus lâches et dans son cas, la volonté de nuire de la hiérarchie - hiérarchie qui suppléait au vide "politique" des écritures - s'est là encore substituée aux textes. Dommage que l'éradication des religions soient impossible, un remède au moins aussi maléfique que le mal qu'elles représentent! Il faut s'en remettre au bon sens, à l'intelligence, à l’éducation... autant se pendre!

A la différence de l'écriture de Boualem Sansal que je trouve somptueuse, je n'aime pas trop celles de Benmalek et de Boudjedra. Celle de Benmalek est à mes yeux, trop neutre, je la préfère cependant à celle de Boudjedra, trop proche de ces écritures de vent, hachées, de France. Evidemment, celle de Sansal est un prodige, on imagine qu'un Céline sensé, pourvu de talent eut pu écrire ainsi! (Anouar Benmalek, Ce Jour viendra, Pauvert - €20)

12 septembre 2003

Je lâche avec regret le Boudjedra dont le thème aurait pu m’intéresser, publié chez Grasset, il est bien intello - franco - franchouillard. La langue y est informe. Ces gens ne nous parlent pas, ils ne veulent pas qu’on les accompagne dans leur mouvement d’écriture, ils nous jettent à la figure des mots au vol, nous devons les recevoir tel quels, sans lien. Si un point est la marque de la fin d’une phrase, d’un système cohérent et homogène destiné à transmettre une idée, qu’après ce point, le lecteur est censé marquer une pause pour reprendre son souffle, aborder un autre ensemble, qu’on juge du découpage dans ce livre : pour un paragraphe prit au hasard (*) (pages 40 – 41), les points déterminent 22 phrases dont seules 4 sont des éléments de discours cohérents (et encore pour une cela est incertain). Le reste est constitué de mots jetés à la face du lecteur. Ici, on recherche l’effet image, il ne faut pas que le lecteur suive, ré - écrive en lisant. C’est une sorte de terrorisme de la langue, choquant quand on se reporte au propos de l’auteur. Est-ce un hasard si ce type d’écriture apparaît dans la littérature française au moment où l’analphabétisme atteint un niveau record ? Dommage que cette maladie « parigotique » ait gagné les autres sphères de la francophonie. A vrai dire, j’ai l’impression que dans la suite du livre, Boudjedra se laisse un peu moins aller à cette écriture « facile » et primitive, trop tard pour moi, l’envie de lire m’est passée. Qu’on m’entende bien, je ne suis pas censeur, je suis simplement découragé, ces gens comme jadis ceux du Nouveau Roman, pour d’autres raisons, m’ôtent l’envie de les lire.

(*) Oui, il est pris au hasard, mais parce qu’au fil de la lecture c’est lui qui me heurte, qui m’arrête. Cette précision est, il me semble, une correction utile au terme « hasard ».

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Un livre de Philippe Alméras, un célinien celui-là! (connaisseur de...) Il estime que le Céline du Voyage et celui des pamphlets « sont » un seul homme ! D’accord avec lui. Pour moi le style de Céline est lié de façon indissoluble à son contenu, il en est ainsi de tous les écrivains « éjaculatoires » et Céline l’est par excellence. Supporter le style, c’est avaler le contenu, on ne peut pas sortir de ce dilemme. Ce n’est pas par hasard si le seul texte de Céline qui me réjouisse est l’Agité du bocal ! Je ne donnerais pas un cens de tout le reste, Voyage compris. Le livre d’Alméras est quant à lui intéressant, écrit dans une langue agréable et je m’y plonge avec satisfaction après les dernières déconvenues.

(Philippe Alméras - Voyager avec Céline - Dualpha - €23)

15 septembre 2003

Je lis avec plaisir le livre de Alméras, célinien qui sachant écrire n'est pas obligé de recourir à un pseudo sabir célinien trois points. Il y a des moments où ses aventures universitaires avec, entre autres, ses thèses sur Céline tournent au picaresque. Pour ceux qui ont encore des illusions sur ce petit monde... En ce qui concerne Céline, bien entendu que la preuve que ce dernier était raciste (fou) avant même le Voyage me satisfait. Non spécialiste, j'ai toujours pensé que le même homme avait écrit le Voyage et les Pamphlets, mais que dans le Voyage il avait dissimulé. J'ai de même toujours tenu en mépris les anarchistes qui se sont épris de ce livre. En effet, je ne vois pas en quoi la vision immonde des hommes qu'a Céline peut satisfaire un anarchiste sauf s'il est du genre à se réjouir dans son coin que tout soit pourri! Céline à mes yeux représente la négation de la croyance en l'homme, en un minimum de possibilités de progrès. C'est pour cela que je n'ai jamais pu lire jusqu'au bout ce livre que je ne considère pas comme révolutionnaire en ce qui concerne la langue. La "révolution célinienne" viendra plus tard, elle suivra l'acharnement dans l'immonde, tout simplement parce qu'elle n'est qu'arme de propagande destinée à "faire passer" le contenu, même en laissant simplement des traces, une semence, dans l'inconscient du lecteur. Céline est un fou, son écriture est celle d'un détraqué comme tous les racistes il est malade de cette maladie. Il suffit de regarder un raciste d'aujourd'hui, Le Pen par exemple, pour voir la maladie derrière ces visages haineux, la maladie dangereuse, celle qui tue. Seule cette autre maladie, celle du désir de pouvoir, quand elle est contrariée, nous offre sur les visages les mêmes affreuses séquences de haine (Sarkozy par exemple lors de la défaite de Balladur aux présidentielles quand, hystérique, il s'en prenait devant les caméras aux instituts de sondage - qu'on ait pu faire un ministre et de l'intérieur d'un homme si peu capable de se contrôler me confond!). Le monde des céliniens est intéressant, avec ses vérités tronquées il ressemble à son modèle mythomane, - c'est la Cage aux fous - et c'est souvent l'intérêt qui commande. Le livre d'Alméras est un livre de souvenirs, un parcours. Par contre quand Alméras dit que Bagatelle est structuré! Croyons le puisqu'il a réussi à le lire de la première page à le dernière et je vous jure qu'il y faut du courage, à moins d'être un antisémite forcené! Là aussi, le style n'est pas encore flamboyant, Céline pouvait sous la protection nazie, écrire sans peur. C'est de la basse littérature raciste émaillée d'insultes médiocres. Je me retiens de citer parce que ces saloperies feraient peut-être encore des émules! Je vois la gueule des Gallimards le jour où il faudra sortir le cinquième pléiade Céline (à moins que plus personne ne lise dans la famille)! Et celle des Tartuffes qui mentent  depuis toujours au sujet de ces fameux pamphlets dont des pages entières auraient pu être écrites par Gyp! Quelle référence! Il leur faudra deux pages de commentaires pour une de texte pour enrober! Alméras dit que ces textes ne feront pas un antisémite de plus! Là n'est pas le problème, je ne supporte d'ailleurs pas l'idée d'imaginer un seul immonde se masturbant de plaisir imbécile devant des citations que je serais responsable d'avoir faites, voilà simplement ce qui m'empêche concernant des gens comme Céline, Gyp ou Béhaine de citer le pire pour démontrer quoi que ce soit! Une fois de plus je demande : qu'attendez-vous de la littérature? Pas au maoïste Sollers qui tend la main, savoir faire en moins, à l'hitlérien Céline, rien que de naturel, mais aux autres, à ceux qui pensent qu'on ne peut pas éternellement écrire n'importe quoi, que l'écrivain, l'artiste, comme les autres, plus que les autres est responsable et que le droit absolu à la différence ne recouvre pas le droit au meurtre. D'ailleurs, tous ces intellectuels qui par leur comportement proclament l'impunité de l'artiste, ne prétendent-ils pas dans le même temps faire éternellement la leçon au public censé, lui, être responsable de ses choix - ils l'en condamnent et méprisent sans gêne sans cesse - tout en étant tellement inapte qu'il doit être guidé (par les irresponsables ci avant bien entendu? Admirent-ils le populisme de Céline parce qu'ils ignorent le "peuple" - entendez les gens modestes, vous et moi - dans sa diversité et le confondent - comme leur Maître - avec ce qu'il a de pire? Ils me font penser à des gens qui voulant ignorer leur trou du cul et marchant dans la merde s'esclaffent à la merveille avant que de s'y rouler le nez avec délectation! Nous qui la connaissons, faisons un écart quand nous la rencontrons et tout est dit! Il n'y a chez Céline aucune merveille où elles sont enfouies sous de tels monceaux d'ordures qu'elles sont inaccessibles, le jugement de Malraux, pas contaminé par l'université celui-là, me semble toujours actuel : un pauvre type. Quant au fait que Céline "intéresserait toujours" puisqu'on "on en parle", oui, comme on parle de Hitler, parce que l'existence de néo-nazis nous oblige à la vigilance! Alméras prétend que Céline caresse chez certains quelque chose de pas très propre, caché, ressuscite en somme en la flattant la part inavouable, je devrais en être rassuré car je serais alors exempt des tares qu'il énumère - au moins sous leurs formes les plus virulentes!

16 septembre 2003 Retour Haut de Page  Vaneigem

Raoul Vaneigem publie un livre, Le Chevalier, la Dame, le Diable et la mort. Je suis certainement d'accord avec beaucoup de ses idées, mais quel verbiage! Un doute affreux me prend, est-ce que nos écrits apparaissent toujours sous cette forme aux autres? Des mots ronflants sur des maux, vains pansements? Mai 1968 n'est jamais loin, révolution verbale, long et vain bavardage. Au hasard je cueille le titre d'une oeuvre de Romain Gary que l'on juge imbécilement au passage pour ses idées politiques (*), Au-delà de cette sortie (au lieu de limite) votre ticket n'est plus valable, certainement une coquille d'éditeur. Je cite quand même ce passage digne du seul marxiste respectable (Paul Lafargue auteur du Droit à la paresse, que je n'ai jamais lu au nom de ladite mais que j'ai toujours considéré avec tendresse comme ma bible sur la foi du titre programme (**).) "La grâce de ne rien faire procède d'un effort que la constance fait oublier. Quel plaisir de se livrer à l'un et l'autre!" p183. En relisant ce que je viens d'écrire je me dis que je devrais réfléchir à ce terme "vains" appliqué avec "bavardages" à certains mots que l'on écrit. Sont-ils vains ces mots parce que "ronflants", d'aspect romantique par leur "manque de tenu" et par là détournés de leur sens? J'aime de plus en plus, soit les écritures dépouillées, sans effet, soit celles dont la musique me touche (le Proust de la Recherche par exemple que je ne lis que pour le plaisir de la musique, bercé par les mots, en oubliant parfois le sens). Ces écritures que j'aime ont en commun de ne pas se "laisser aller". Je voulais comparer l'écriture "actuelle" de Vaneigem avec celle du Traité, hélas, piles de livres soulevées, étagères explorées, impossible de remettre la main sur ce livre que j'avais pourtant "mis de coté"! J'en profite pour lancer un appel : si vous êtes mécène, Emir du Pétrole, Roi de l'Informatique ou Autre, n'hésitez pas à faire un don de quelques dizaines de milliers d'euros pour la construction d'une mienne bibliothèque, en échange je vous garantis de dire du mal de vous sans hésiter si l'occasion s'en présente, ce qui vous donnera le rare plaisir de subventionner un ingrat et ce qui vaut mieux que de léguer son bien aux racistes de toutes sortes comme le font des franchouillards fortunés qui lèguent leur bien à un certain salaud!

Raoul Vaneigem, Le Chevalier, la Dame, le Diable et la mort, le cherche midi, €17.

(*) Je suis très loin de partager les idées politiques de Romain Gary mais elles ne sont guère pires, au contraire, que la plupart de celles des intellectuels de son époque qui baisaient les pieds de Staline et, de plus, étant nées de la guerre et de la lutte contre les nazis, elles avaient au moins l'excuse d'une origine honorable!

(**) J'ai habité pendant vingt-deux ans une rue Paul Lagargue qu'une imbécile municipalité fascisante (maire aristo colistier de Le Pen) a débaptisé au profit d'un obscur "paroissien" local.

Aperçu chez un libraire une biographie de l'abbé Mugnier. Je lance un appel : qui aura le courage enfin de nous donner une édition complète de son Journal? La lecture des extraits actuellement accessibles est d'un tel plaisir!

21 septembre 2003 Retour Haut de Page Sepulveda

Pour chaque étoile blanche du drapeau américain, existe une étoile noire. Les quarante millions d'indiens patiemment massacrés, ce qui constitue non seulement le plus grand génocide de tous les temps, mais aussi "le mieux réussi" - les Anglos-saxons sont d'une efficacité redoutable quand il s'agit de tailler dans la masse (*) - en sont la première. Pinochet en est une autre, c'est de celle-là, qu'il connaît bien, que Luis Sepulveda nous parle opportunément, nous rappelant ainsi, à l'heure de l'Irak, quel souci ils peuvent avoir de la démocratie dans le monde! On le sait, Pinochet a été reconnu fou par la justice de son pays, comme est donc nécessairement folle (nous n'en doutions pas, folle et furieuse) son amie Tatcher, comme sont fous un certain nombre de crétins qui ont appelé à l'effacement de la mémoire au Chili, au nombre desquels Jean Daniel, ce clone gaudiclant du vaticianesque Jean-Vingtdouze! Au Chili le cuivre, en Irak le Pétrole, un jour ces voleurs viendront, pour alimenter leur obésité, nous piquer nos camemberts et les artichauts bretons! Sepulveda nous rappelle ce que nous avons garde de ne pas oublier : l'autre visage, le vrai, du libéralisme qui s'appelle fascisme. Une lecture indispensable à l'heure de ces saloperies satellites de l'US : le mondialisme, le Fonds Monétaire International et l'Europe libérale.

(*) Il semble bien qu'en Irak, la trouille qui est la grande maîtresse de l'obèse troufion américain soit la grande maîtresse du jeu et si l'on comptabilise volontiers les quelques occupants morts, - que font-ils donc là-bas? - on oublie de donner le nombre des victimes de cette peur panique de l'occupant, il est vrai que pour ces gens un bon Arabe est un Arabe mort, c'est certainement pour cela qu'ils tirent même sur les collabos qui leur cirent les pompes!

La folie de Pinochet - Luis Sepulveda - Métaillé - €13

25 septembre 2003 Retour Haut de Page Gide, Thomas, Martin du Gard, Tardieu, Valbert

Bonnes surprises de cette rentrée : les correspondances. D'abord Gide - Mayrisch que je reçois de l'AAAG (Association des Amis d'André Gide) sous la couverture bleue des cahiers remise à l'honneur; ensuite le choix de lettres de Henri Thomas dans les cahiers de la N.R.F.; enfin dans la collection blanche la correspondance Roger Martin du Gard - Jean Tardieu. Egalement, aujourd'hui, trouvé La Compagnie des Ecrivains de Gérard Valbert. Il arrive souvent qu'artistes et journalistes sous prétexte de notoriété, gratifient le public de mémoires assommants dont ils assurent largement la publicité grâce aux petits copains. Si Gérard Valbert est un homme de radio, c'est également un écrivain, un vrai. Ce livre, feuilleté, me semble vivant et intéressant. L'auteur n'hésite pas à nous parler de lui et je dois dire que quelques unes de ses opinions cueillies au passage d'une pêche de hasard me semblent très intéressantes. Il est vrai que Suisse, il n'appartient pas au fameux microcosme. Aperçu encore un livre sur Céline, mais trop c'est trop, ce salaud ne mérite vraiment pas tant! Peut-être ne s'agit-il que d'un contre feu au livre de Almeras, le syndicat Céline se défend!

Andre Gide - Correspondance avec Aline Mayrisch, Gallimard, € 21

Henri Thomas, Choix de lettres 1923 - 1993, Gallimard, €31,50

Roger Martin du Gard - Jean Tardieu, Lettres croisées, Gallimard € 31,50

Gérard Valberg, La Compagnie des Ecrivains, L'Age d'Homme € 24

30 septembre 2003 Retour Haut de Page Eco

J'ai trouvé pour mon malheur chez mon petit libraire de province, De la littérature de Umberto Eco. Ce livre n'appartient à notre rentrée littéraire que par sa traduction, nos malheureux voisins italiens ont déjà pu le découvrir l'année dernière, mais soyons honnêtes, personne n'est encore obligé (*) de lire de tels pensums prétentieux, inutiles et dont la littérature est totalement absente (**). Comment appeler cela? Critique? Elucubrations professorales, divagations universitaires, peut-être, mais ces termes me semblent encore trop! Livre inutile, un de plus, qui n'apporte rien, qui permet simplement de savoir qu'un auteur de gros romans pas très intéressants est capable d'écrire de petits essais encore moins intéressants! Littérature dites-vous? Cela est publié chez Grasset. Sur la quatrième de couverture on décline les titres de l'auteur, entre autres Directeur de l'Ecole Supérieure des Sciences Humaines de Bologne, ceci explique cela! (Ecole "supérieure" encore une, vous en connaissez des inférieures vous? - Sciences humaines, voila comment on appelle les prétentieux -"sciences" - balbutiements au nom desquels on érige des jargons de charlatans qui constituent, il faut bien le reconnaître, l'essentiel de ce qu'on nous montre de ces sciences!)

(**) Sauf, peut-être, les élèves de l'Ecole Supérieure des Sciences Humaines de Bologne, qui pouvaient aller étudier autre chose ailleurs!

(**) Dans le titre, peut-être?

Retour Haut de Page Gary

Gallimard annonce la réédition en Folio de Pour Sganarelle de Romain Gary, ce livre était devenu difficile à trouver et c'est avec intérêt qu'on lira les considérations sur la littérature et le roman d'un (des derniers) authentique(s) "grand" écrivain(s) de langue française. (Bon antidote à des livres tel celui qui est cité ci-dessus.) Précisons que Romain Gary n'était pas Directeur d'école de Sciences Humaines ou Inhumaines,

Romain Gary : POUR SGANARELLE - FOLIO . 560 pages - €9,70
Annonce Gallimard : «Pour Sganarelle peut être considéré comme une préface à un roman en cours d'élaboration : Frère Océan.» Lequel se poursuit dans La danse de Gengis Cohn et s'achève avec La tête coupable.


1 octobre 2003  Glucksmann

Un livre qu'on pourra avec avantage se dispenser de lire et surtout d'acheter, c'est bien celui que nous propose Monsieur André Glucksmann. On le sait certains philosophes, certains intellectuels, ont toujours ressenti le besoin tout à la fois d'une protection et d'un homme fort capable de leur donner la fessée! Jadis, Sartre avait Staline, Glucksmann et de nombreux copains à lui l'ont partagé sous les couleurs de son clone chinois, Mao, à une époque où il ne fallait pas être très intelligent - mais le sont-ils? - pour comprendre face à quels monstres on se trouvait! Depuis Victor Serge suivi de bien d'autres, on savait quels ignobles crapules avaient été Trotski, Staline, Mao et consorts et il faut s'appeler Béhachel pour reprocher à Gide de ne pas pleurer sur le sort d'un quelconque Boukharine ou d'une autre des crapules du Comité Central que leur petit copain Staline expédiera avant de l'être lui même! Tout ce petit monde se réveilla fort tard, d'une leçon qu'il nous faisait, il passa à une autre, il resta tout aussi péremptoire, malhonnête, il l'est encore quand il se met à lécher le cul de Georges Bush, pourtant : "ça pue!" Stalinien on naît, Stalinien on reste même sur les genoux très néo libéraux des escrocs à la Georges Bush! Rien d'étonnant donc que ces gens applaudissent les guerres du pétrole rebaptisées guerres démocratiques tout comme les populaires... démocraties de leur jeunesse! Revel le faux révolté et bien d'autres les ont précédé sur le chemin des baisse culotte arrogants! Ils prennent la suite des Aragon, Eluard, Breton, Neruda et tant d'autres de moindre importance, auteurs d'odes au Petit Père des Peuples! Nous ne les prendrons pas au sérieux, pas plus que la pseudo philosophie de laquelle ils se réclament, ils ne nous en voudront pas, ils nous insulteront, c'est l'habitude des intellectuels qui pensent comme la CIA, un certain Benoît Duteurtre ou Dutertre ou quelque chose comme cela, pas d'importance, nous traitait déjà de piliers de bistrots alors qu'il est impossible qu'il n'y ait pas séjourné bien plus longtemps que moi, par exemple, qui n'y met jamais les pieds!

10 octobre 2003 Lottman, Lepape

Deux livres sur l'écrivain, la littérature ou la langue (française), assez différents l'un de l'autre. Le premier de Herbert Lottman, nous convie à une courte visite chez quelques écrivains "engagés". Ce n'est pas une étude, ce n'est pas une histoire, ce sont des histoires et de la vulgarisation. Lottman donne à Gide la place qui lui revient dans l'engagement : la première en ce qui concerne le siècle dernier - auquel nous appartenons encore si j'en juge par le nombre des saloperies en cours - et si l'on considère que Zola appartient au précédent et que l'engagement, ce n'est pas être partisan, au contraire, mais prendre le risque d'être seul. On est loin des conneries de Béhachel, heureusement! Le second livre est de Pierre Lepape, si vous ne devez en lire qu'un lisez celui-ci. On pourrait également dire qu'il ne s'agit pas d'une histoire - histoire de la littérature française dans ses relations avec son pays - mais d'histoires. Histoires nombreuses, qui, situant à chaque fois assez bien le décor, nous donne une vision très forte de l'épisode et qui, même si, comme nous le dit l'auteur, d'autres histoires auraient pu prendre place ici, approchent assez bien d'une histoire inhabituelle de notre littérature (dans ses rapports avec l'autorité) et de ses acteurs dans la société.  C'est écrit dans un langage clair et agréable, cela se lit comme un roman, c'en est un. Cela se termine à la mort de Sartre, Sartre, cet engagé à la Barrès! S'il faut une date, prenons celle-là, mais le véritable engagement ne serait-ce pas plutôt celui d'un Gary et dans ses représentations majeures, c'est à la mort de Gide qu'il a cessé d'occuper la première place puisqu'on lui donne ce pauvre Sartre comme successeur! Au sujet de cette langue qui est la notre, le français, je me souviens de ces jours pas très anciens où j'apprenais à lire à mon fils et ,où, à chaque instant je rageais contre "ces cons" responsables d'une langue aussi peu rationnelle au plan de la représentation des sons, à croire que ces gens n'avaient rien compris à l'écriture alphabétique! Que dire ensuite de l'orthographe? Oui, cette langue fut bien une arme entre autres celle que des privilégiés utilisaient contre le pauvre peuple, le commun! Ce livre a un grand mérite, pour ceux qui croyaient encore que les écrivains sont des révoltés, la longue litanie des écrivains paillassons sera une révélation, pour les autres l'auteur leur fera peut-être comprendre que dans certains cas la soumission a des raisons "défendables" et honorables même si on notre premier mouvement est de les réprouver.

Herbert Lottman, L'Ecrivain engagé et ses ambivalences de Chateaubriand à Malraux. Odile Jacob, €25,90

Pierre Lepape, Le Pays de la Littérature, Des serments de Strasbourg à l'enterrement de Sartre. Seuil, Fiction et Cie, €26.

18 octobre 2003 Pour une revue

Un auteur dont j'ai parlé et à qui j'avais adressé les coordonnées du site m'a répondu. Cela, évidemment fait plaisir. Je ne dirai pas de qui il s'agit parce que je n'ai pas sollicité son autorisation et qu'une correspondance privée n'est pas forcément publiable sur le vif. Ce qui me retient ici, dans cette réponse c'est la confirmation des doutes que j'émettais concernant les éditeurs et la tentation de repli sur l'ancien que connaissent ceux qui sont confronté au vide de la vie littéraire française (je ne parle pas de l'aspect médiatique du livre qui est très différent et a, aujourd'hui, peu de choses en commun avec la littérature). Je la connais bien cette tentation, cette année je lui ai - un peu - résisté, ce n'est pas toujours le cas et combien de fois au moment de la rentrée littéraire, après le Kadaré, un Sepulveda, depuis quelques temps un Paasilinna et quelques autres quand même, le plus souvent étrangers, je retournais à mes auteurs favoris ou je continuais mes recherches d'auteurs anciens. Dois-je le dire, j'ai mauvaise conscience quand j'agis ainsi parce que je sais que notre époque n'est pas forcément à condamner, que même en France, aujourd'hui, il y a de bons auteurs et peut-être un ou deux qui, en d'autres temps, auraient pu tenir une place importante dans la vie intellectuelle, je parle d'une vraie vie intellectuelle, pas des simagrées solleriennes ou béhachellistes! Que manque-t-il donc à nos lettres pour que vive la littérature? On l'a dit et redit, les éditeurs ne font plus leur boulot, ils ne sont que des épiciers, des mauvais épiciers, de ceux qui mettent au même rang sur l'étal la merde et le meilleur en attendant que le client choisisse et qui, prêts à tout vendre, se foutent de son choix! Les libraires! Ils doivent vendre et combien de fois ai-je plaint silencieusement ma libraire du boulevard des Italiens contrainte de faire l'article pour des livres qui... Les revues  et les journaux tenaient un rôle important dans la diffusion de la littérature, tous les journaux! Aujourd'hui qu'en reste-t-il? Mettons tout de suite de coté l'emmerdante N.R.F qui n'est même plus l'ombre d'elle même, la plupart des revues ne sont que des tribunes d'écrivains universitaires - peut-on dire écrivains? Le jargon de ces messieurs est tel qu'il rebute tout lecteur qui n'est pas astreint par des études en général, autrement par vice, à leur lecture. La presse, elle, a renoncé aux publications d'oeuvres originales en feuilletons, ses critiques appartiennent le plus souvent à des coteries diverses et ne sont absolument pas fiables, elle se complait dans les commémorations, commémorations de naissances - naissances des morts bien entendu - de décès ou, de temps en temps dans des opérations commando pour restaurer l'image d'un "grand mort", opérations profitables à des vivants du sérail et à des éditeurs. Je pense en particulier à la ridicule opération de remise en selle de Sartre (Jean-Paul) avec participation du grand faiseur Béhachel. Que faire pour aller au-delà? Aller remuer les mains ou expliquer que l'on préfère être sucé que sucer à coté d'une rombière princière ou putasse, ou les deux à la fois et d'échappés de starac, chez Ardisson? Laissons cela aux évêques sans évêchés et aux ministres ou anciens ministres en mal d'électeurs et autres animaux savants ! Que reste-t-il pour aider le lecteur à trouver les valeurs qui en valent la peine dans le maquis de l'édition? Peut-être Internet! Le public ne rajeunit pas, mais en se renouvelant il est de plus en plus composé de gens à qui l'informatique ne fait pas peur et qui n'hésitent pas à employer cet outil nouveau qui en vaut bien d'autres! Les éditeurs sont sur la toile parfaitement inutiles c'est à dire réduits à leur rôle actuel réel! Alors! Pourquoi les écrivains ne viendraient-ils pas parler d'eux et de leurs confrères en termes simples, peut-être à coté de lecteurs "avertis"? Présenter leurs oeuvres ou en donner des extraits sur un "site revue" qui pourrait même fonctionner sur abonnement? Quels écrivains? Des gens d'horizons divers! Fajardie, Tillinac, Rouart, Amette, Sansal, Bernheim...

Je voulais absolument parler du dernier livre paru en France, d'Arto Pasilinna, mais je ne l'ai pas encore lu entièrement. Comment expliquer qu'on puisse commencer et ne pas terminer un livre qui nous plaît? D'abord, je dois dire que je lis toujours une dizaine de livres à la fois. Parfois j'en prends un nouveau que je lis d'une traite? D'autre part, depuis que j'ai commencé cette page, je recherche des livres "nouveaux". Paasilinna, je le connais bien, je sais que c'est un plaisir de gourmet. Donc je le garde pour une période plus tranquille. Je n'ai quand même pas résisté au plaisir de découvrir ce petit dernier au titre prometteur et j'en ai lu les deux premiers chapitres. En exergue une maxime populaire finlandaise : "Le plus grave dans la vie c'est la mort, mais ce n'est quand même pas si grave." Le ton y est. Je ne raconterai ni ne dirai rien de plus, si vous avez déjà lu un Paasilinna cela ne servirait pas, vous savez quel plaisir vous attend, si vous ne le connaissez pas encore je vous laisse celui de la découverte, sachez que ce livre a l'air d'être digne du précédent : "La douce empoisonneuse" délicieux récit des crimes d'une vieille dame.

Arto Paasilinna, Petits suicides entre amis, Denoel, €20

20 octobre 2003

Pourquoi ne pas mettre cela sous le signe de la rentrée : un dictionnaire des littératures policières? J'avais cherché en vain ce genre d'ouvrage il y a quelques mois et avais été contraint de me rabattre sur des histoires du roman policier. Là, je crois que le lecteur est gâté! Deux gros volumes, de 920 pages chaque, cartonnés, imprimés sur un bon papier, sobrement mais bien illustrés. Si j'en juge par les quelques articles que j'ai égrenés rapidement la documentation est solide, je ne suis pas assez compétent sur le sujet pour affirmer que cet ouvrage est complet mais je doute qu'il ne me satisfasse pas et je pense qu'il faudra être un sacré spécialiste pour ne pas l'être! Dans sa courte préface, François Guérif nous dit que ce dictionnaire va faire le bonheur des marchands de livres anciens, c'est bien possible car il est de nature à donner envie de lire et de découvrir un genre qui recèle de nombreux chef-d'oeuvres ou auteurs trop méconnus, ne serait-ce par exemple qu'un Gaboriau. On trouvera à juste titre dans ce dictionnaire, entre autres André Gide pour ses enquêtes sur des affaires criminelles et pour Les Caves et les Faux Monnayeurs et Emile Zola pour Thérèse Raquin mais aussi Balzac et Dostoïevski, Joseph Conrad et Jack London, n'y figurent pas par contre Stendhal ou France, le Rouge et le Noir ou le Crime de Sylvestre Bonnard n'en étant. Les curieux apprendront que le distingué Jules Clarétie, administrateur de la Comédie Française, académicien sacrifia au genre comme tant d'autres... par exemple Edgar Faure, sénateur, ministre, président du Conseil un moment chef du Parti Radical bien avant qu'il devienne un groupuscule. Entre vous et moi procurez vous vite ce dictionnaire car, si le genre noir et policier n'est pas colonisé dans les années à venir par les connards à grande technicité - je tairais certains noms -, mais ils auront du mal, peut-être deviendra-t-il, en France, le refuge d'une littérature authentique!

 

à suivre, peut-être, avec inquiétude...

 

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